Corruption privée: les Etats refusent de trop durcir la loi

La corruption privée devrait être poursuivie d'office, mais seulement si l'intérêt public est ...
Corruption privée: les Etats refusent de trop durcir la loi

Corruption privée: les Etats refusent de trop durcir la loi

Photo: Keystone

La corruption privée devrait être poursuivie d'office, mais seulement si l'intérêt public est menacé. En plein scandale de corruption à la FIFA et au lendemain de la démission de son président Sepp Blatter, le Conseil des Etats a refusé de trop durcir le code pénal.

Les sénateurs ont tranché mercredi par 23 voix contre 22. Les infractions ne menaçant pas l'intérêt public ne seront poursuivies que sur plainte, a expliqué Fabio Abate (PLR/TI) au nom de la commission. Le projet du Conseil fédéral, déjà minimal, a été édulcoré et vidé de sa substance, a critiqué en vain Robert Cramer (Verts/GE).

Il n'y a pas de raison de faire des exceptions à la poursuite d'office de la corruption privée, a renchéri la ministre de la justice Simonetta Sommaruga. La restriction posera des problèmes d'application car 'qui décide de ce qu'on entend par intérêt public?' Si un enseignant accepte de l'argent en échange de bonnes notes, 's'agit-il d'un intérêt privé ou public?', a-t-elle illustré.

L'intérêt public n'est que rarement pas menacé, a estimé Thomas Hefti (PLR/GL). Cette exception n'édulcore donc pas la loi.

La tempête judiciaire qui éclabousse la FIFA est 'la conséquence d'une réglementation nationale insuffisante', a tonné Christian Levrat (PS/FR). C'est un problème auquel il faut remédier en donnant à la justice le pouvoir de poursuivre d'office toute personne qui corrompt ou se laisse corrompre, a-t-il plaidé sans succès.

Trois ans de prison

Selon le Conseil des Etats, qui a suivi sur ce point le Conseil fédéral, la corruption dans le secteur privé devrait être punie de trois ans de prison au maximum. Les sanctions pourront s'appliquer à des entreprises ou des associations de droit privé, comme les associations sportives.

Les sénateurs ont refusé par 28 voix contre 14 de porter la peine à cinq ans de prison maximum si l'avantage est supérieur à 10'000 francs, comme l'aurait voulu la gauche. Dans la foulée, les élus ont ajouté une disposition précisant que les avantages conformes aux usages commerciaux ne constituent pas des avantages indus.

Avec cette disposition, les autorités suisses ne pourraient pas poursuivre Novartis pour les faits que lui reproche un tribunal américain, a critiqué Géraldine Savary (PS/VD). Le géant pharmaceutique bâlois est accusé outre-Atlantique d'avoir consenti des rabais pour favoriser les ventes de médicaments couverts par des assurances sociales.

Le projet prévoit par ailleurs d'étendre la norme sur la corruption d'agents publics. De tels comportements deviendraient punissables dans tous les cas, y compris quand ce n'est pas l'agent lui-même qui touche l'argent, mais un tiers comme un club sportif. Le National doit encore se prononcer sur le dossier.

Dans le viseur de la justice américaine

La révision de la loi répond à des recommandations faites par le Groupe d'Etats contre la corruption (GRECO) à la Suisse fin 2011. Mais elle intervient surtout au moment où la Fédération Internationale de Football Association (FIFA) est éclaboussée par des accusations de corruption.

Mardi, son président Sepp Blatter a annoncé qu'il jetait l'éponge. L'annonce de sa démission fait suite aux arrestations spectaculaires de sept dirigeants de la Fédération internationale mercredi dernier à Zurich. Ceci à la demande de la justice américaine qui a inculpé neuf de ses cadres.

La FIFA est aussi dans le collimateur de la justice suisse. Dans le cadre d'une procédure pénale ouverte le 10 mars, le Ministère public de la Confédération (MPC) a saisi le même jour des documents et des données électroniques au siège de l'organisation à Zurich. Ces documents sont liés à l'attribution des Coupes du monde de football 2018 à la Russie et 2022 au Qatar.

/ATS


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