La population de Moutier (BE) s'apprête à vivre dimanche une journée historique. En fin d'après-midi, elle saura si elle quitte le canton de Berne pour rejoindre celui du Jura. L'issue du scrutin présenté comme le plus surveillé de l'histoire suisse est incertaine.
'Voulez-vous que la commune de Moutier rejoigne la République et Canton du Jura?' C'est la question posée aux 4426 ayants droit, soit un nombre légèrement moindre que lors du vote du 18 juin 2017. Ce scrutin doit mettre un terme définitif à la Question jurassienne, une question qui date de plusieurs décennies.
Dimanche, la cité prévôtoise sera divisée en deux pour éviter des incidents, et un dispositif policier renforcé sera mis en place. Le comité 'Moutier ville jurassienne' a établi son quartier général à l'Hôtel de la gare, à l'est de la ville. Le comité 'MoutierPlus' a choisi le Forum de l'Arc à l'ouest pour attendre les résultats.
Zone de démarcation
Il est prévu que chaque camp respecte ce découpage de la ville et ne dépasse pas le point de démarcation situé au rond-point du Suisse et à la rue de l'Hôtel-de-Ville. Le camp gagnant sera autorisé à se rendre en vieille ville après la proclamation des résultats, tout en évitant de se réunir en groupes supérieurs à 15 personnes.
Les manifestations sont interdites et il n'y aura aucune allocution publique en raison du risque sanitaire. Autorités municipales et comités de campagnes ont lancé des appels au calme. Le Conseil municipal à majorité autonomiste invite la population à éviter tout débordement et à respecter en tout temps les mesures sanitaires.
Si le oui l'emporte, la soirée pourrait malgré tout être animée et festive. Il est probable que des centaines de Jurassiens afflueront dans la cité prévôtoise pour célébrer ce résultat. Si le non devait l'emporter, des militants autonomistes pourraient se sentir floués et exprimer leur désenchantement dans la rue.
Comme il y a quatre ans, la police cantonale bernoise ne divulgue pas son dispositif. Elle entend suivre et évaluer la situation dans les rues de Moutier en permanence pour réagir le plus rapidement. Elle sera en contact avec tous les partenaires impliqués dans le cadre du processus de vote.
Registre électoral
La tension est subitement montée ces dernières heures avec les interrogations du canton de Berne sur la tenue du registre électoral. Dans un communiqué diffusé la veille du vote, le gouvernement bernois s'interroge sur le fait qu'un nombre de personnes plus élevé que la moyenne a déménagé à Moutier, posant la question du tourisme électoral.
Le Conseil-exécutif répondait au Département fédéral de justice et police qui s'informait de l'avancement des vérifications du registre électoral. Le Conseil municipal de Moutier s'est dit étonné de cette 'intervention intempestive' du gouvernement bernois.
Le vote du 18 juin 2017 a été invalidé par la justice bernoise en raison de dysfonctionnements en lien justement avec le registre électoral. Cet outil fait depuis des mois l'objet d'un contrôle systématique de la Chancellerie bernoise et de la Ville de Moutier.
Scrutin sous haute surveillance
Des mesures exceptionnelles ont été prises par la Confédération pour que cette votation hautement émotionnelle se déroule d'une façon irréprochable. Six observateurs fédéraux contrôleront les opérations de dépouillement et dix collaborateurs de l'Office fédéral de justice (OFJ) vérifieront les cartes de légitimation.
Les opérations de dépouillement et l'annonce du résultat seront filmées et diffusées en direct sur la page Facebook et la chaîne YouTube de la Municipalité.
Ce scrutin est censé mettre un terme à la Question jurassienne, une question qui date de plusieurs décennies. Le vote du 18 juin 2017, qui avait débouché sur une majorité de 137 voix en faveur du transfert dans le canton du Jura, a été invalidé par la justice bernoise en raison d'irrégularités.
Moutier constitue un cas à part dans le conflit jurassien. Lors des plébiscites de 1974 et 1975 qui ont abouti à la création du canton du Jura, la cité prévôtoise avait choisi son maintien dans le canton de Berne. Mais depuis plusieurs décennies, le corps électoral élit des autorités autonomistes.
/ATS