Face à la menace qui ne faiblit pas, la Suisse doit renforcer son arsenal antiterroriste. Le Conseil des Etats a néanmoins renvoyé en commission deux projets du Conseil fédéral, mettant en doute les mesures entourant la coopération internationale.
Par 33 voix contre 12, les sénateurs ont suivi une proposition de Beat Rieder (PDC/VS) pour que la commission de la politique de sécurité, compétente, procède à un nouvel examen - sur la base d'un rapport de la commission des affaires juridiques - du volet renforçant la coopération internationale et permettant à la Suisse de ratifier la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et son protocole additionnel.
Selon le projet du Conseil fédéral, le Code pénal devrait être complété par une interdiction de recrutement, d'entraînement et de voyage en vue d'un acte terroriste. La disposition s'appliquera tant aux groupes qu'aux individus isolés. Les appels au crime et l'apologie du terrorisme seront poursuivis en vertu des dispositions pénales sur l'incitation à la violence ou sur l'instigation.
Pour Beat Rieder, lui-même avocat, les mesures concernant la coopération internationale vont plus loin que la lutte contre le terrorisme. Il craint que les procureurs ne soient obligés de donner à leurs homologues étrangers d'autres informations que celles liées au terrorisme.
Menace maintenue
Pour la ministre de la justice Karin Keller-Sutter, il n'en est rien. Les autorités judiciaires suisses ne seront obligées à rien. Elles décideront seules des informations qu'elles transmettent et leur souveraineté sera protégée, a-t-elle martelé.
La menace n'est pas tombée, a poursuivi la conseillère fédérale, rappelant l'attaque contre une synagogue et un restaurant turc à Halle en Allemagne en octobre dernier. On ne peut pas lutter efficacement contre le terrorisme sans coopération internationale.
Dans la foulée, le Conseil des Etats a décidé par 34 voix contre 10 de renvoyer également en commission le second aspect du paquet antiterroriste, concernant les mesures policières préventives. Pourtant, la commission de la sécurité politique du Conseil des Etats avait donné son aval aux projets du Conseil fédéral, allant même plus loin sur certains points. Les deux volets doivent être traités en même temps, a justifié Daniel Jositsch (PS/ZH).
Arsenal en vue
En matière de prévention, le Conseil fédéral propose un arsenal visant les individus représentant une menace mais ne pouvant faire l'objet d'une procédure pénale. Il sera possible d'obliger quelqu'un à se présenter à un poste de police ou à une autre autorité à des horaires déterminés, de lui interdire de quitter la Suisse en lui confisquant son passeport, de le confiner dans un périmètre déterminé ou de lui interdire l'accès à un endroit ou le contact avec certaines personnes.
Ces mesures pourront concerner des personnes dès l'âge de 12 ans. Le Conseil fédéral souhaite les limiter à six mois reconductibles une fois. La commission avait souhaité qu'elles puissent être prolongées par tranches de six mois.
En dernier recours, il sera possible de prononcer une assignation à domicile pour les plus de 15 ans, mais avec l'aval d'un juge, prévoit aussi le Conseil fédéral. Il faut pouvoir les prolonger dans le cas de terroristes potentiels étant toujours considérés comme dangereux, faute de quoi fedpol aurait les mains liées à l’échéance de la durée des mesures.
/ATS