Les cantons devraient gérer l'admission des médecins remboursés par l'assurance maladie. Le Conseil des Etats a adopté lundi sans opposition un nouveau concept de pilotage du domaine ambulatoire. Mais il l'a épuré des points contestés introduits par le National.
La nouvelle réglementation vise à canaliser l'offre et donc la hausse des coûts. Elle devrait prendre définitivement le relais de l'actuel moratoire, qui vient d'être prolongé jusqu'à fin juin 2021. Le Conseil fédéral réglerait les conditions générales d'admission, la loi définirait certaines exigences à remplir et les cantons limiteraient le nombre de médecins.
Libre choix du médecin
Le National avait revu la copie du Conseil fédéral. Pour éviter toute déconvenue, le Conseil des Etats l'a encore remaniée. Pas question notamment de permettre aux cantons d'assouplir à ce stade l’obligation faite aux assureurs de rembourser les prestations de tous les médecins. 'Ce serait une déclaration de guerre', a averti Hans Stöckli (PS/BE) au nom de la commission.
Le libre choix du médecin ne doit pas être remis en question si l’on veut que le projet ait une chance d’être accepté par le peuple. Les sénateurs n'ont pas voulu non plus donner aux assureurs un droit de recours contre les décisions des cantons concernant la fixation et le calcul des nombres maximaux de médecins admis. Les caisses peuvent déjà donner leur avis auparavant dans la procédure.
La Chambre des cantons ne veut en outre rien savoir d'un couplage du projet avec celui de nouveau financement de l'ambulatoire qui prévoit que les cantons mettent également la main au porte-monnaie. Cela pourrait bloquer le dossier pendant des années.
Maîtriser la langue de la région
La loi fixe une série de conditions pour pratiquer à la charge de l'assurance de base. Seuls les médecins participant à un système de dossier électronique du patient pourront être admis.
Autre condition posée notamment face aux médecins étrangers: le praticien devrait avoir travaillé pendant au moins trois ans dans un établissement suisse de formation postgrade, dans le domaine de spécialité concerné, et disposer des compétences linguistiques nécessaires. Le Conseil fédéral s'était opposé à cette formulation pour des raisons de libre circulation avec l'UE.
Par 22 voix contre 17, les sénateurs ont renforcé l'exigence linguistique. Un médecin devrait maîtriser la langue de la région pour être admis à pratiquer. Il devrait passer un test pour le prouver. Les personnes titulaires d’une maturité suisse ou ayant fait leurs études de médecine dans la langue officielle de la région dans laquelle elles exercent seraient exemptées de cette obligation.
La gauche aurait aimé laisser plus de marge de manoeuvre au Conseil fédéral. Le ministre de la santé Alain Berset préférait quant à lui sa proposition initiale, rejetée par 20 voix contre 19: le gouvernement pourrait instaurer une procédure d'examen des connaissances de système de santé suisse, qui aurait lieu dans la langue officielle de la région où l'admission est demandée.
Plafonds
Les cantons pourront limiter dans un ou plusieurs domaines de spécialité ou dans certaines régions le nombre de médecins remboursés. Contrairement au National, le Conseil des Etats ne souhaite pas que ce soit une obligation, au dam de Peter Hegglin (PDC/ZG). Sa proposition de s'en tenir à la proposition de l'autre conseil a été repoussée par 31 voix contre 7.
Les sénateurs n'ont pas voulu non plus forcer la main aux cantons en les empêchant formellement de délivrer une admission dans un domaine de spécialité si les coûts annuels par assuré augmentent davantage que ceux des autres domaines de spécialité dans le canton ou que la moyenne suisse pour ce domaine. Cela doit rester une possibilité.
Pas question non plus d'obliger les cantons à procéder régulièrement à une analyse de l'offre et des besoins en matière de soins. Les critères et les méthodes visant à définir les nombres maximaux devront être fixés par le Conseil fédéral. Celui-ci devra tenir compte en particulier des flux de patients entre les cantons et des régions responsables de la fourniture des soins ainsi que de l’évolution générale du taux d’activité des médecins.
Pas pour les médecins actuels
Les médecins déjà admis et qui ont fourni des soins remboursés ne seront pas concernés par les plafonds. Idem de ceux qui exerçaient dans le domaine ambulatoire d’un hôpital et y poursuivent leur activité.
Avant de fixer des plafonds, le canton devrait entendre les fédérations des fournisseurs de prestations, des assureurs et des assurés et se coordonner avec les autres cantons. Le Département fédéral de l'intérieur, ou un tiers, tiendra un registre des fournisseurs de prestations ambulatoires remboursés par l’assurance de base.
Chaque canton désignera de son côté une autorité de surveillance qui pourra prononcer des avertissements, des amendes jusqu'à 20'000 francs voire le retrait temporaire ou définitif de l'admission.
Le dossier retourne au National.
/ATS