Les deux prévenus de 20 ans impliqués dans l'agression sauvage de Saint-Jean, à Genève, n'avaient pas l'intention de tuer, ont affirmé vendredi leurs avocats devant le Tribunal criminel. Une sanction leur laissant une lumière d'espoir a été demandée aux juges.
Jeudi, le procureur Dario Nikolic avait requis des peines de 14,5 et 14 ans de prison, estimant que les accusés avaient participé à deux tentatives d'assassinat. Les victimes de l'agression, deux trentenaires qui avaient été attaqués sans raison par un groupe de cinq jeunes, sont aujourd'hui gravement handicapées.
La défense des prévenus, lors de ses plaidoiries, a essayé de déterminer qui avait fait quoi lors de cette terrible nuit de janvier 2017. Alors que le Ministère public considère les membres de la bande comme des coauteurs des crimes, la défense s'est échignée à bien séparer les actes commis par les uns et par les autres.
Deux scènes distinctes
Guerric Canonica, l'avocat d'un des prévenus, a ainsi rappelé que dans cette affaire, il y a eu deux scènes violentes distinctes que 200 mètres séparent. L'une s'est déroulée au lieu-dit des tables rouges, l'autre, près du temple de Saint-Jean, où une des victimes qui avait pris la fuite a été rattrapée par trois des agresseurs.
Sur la première scène, mon client reconnaît avoir donné deux coups de batte de baseball sur l'un des trentenaires, a noté M. Canonica. Selon l'avocat, rien ne permet toutefois d'affirmer que ces coups ont été portés à la tête. Le prévenu a ensuite pourchassé l'autre victime, puis l'a frappée avec la batte alors qu'elle était au sol.
Le moment a duré quelques secondes, et non quelques minutes, comme le prétend le Ministère public, a poursuivi M.Canonica. Dans ce dossier, il n'existe pas un élément pour dire que mon client 'avait le dessein de tuer'. Lors de l'agression, 'il ne pensait à rien', a poursuivi l'avocat. Il avait un comportement presque instinctuel.
Une famille
Celui qui n'élabore pas ne peut pas penser que la mort est possible, a fait remarquer l'avocat. Sa consoeur, Simine Sheybani, qui s'est associée à la défense du prévenu, a rappelé l'importance pour ces cinq jeunes du groupe qu'ils formaient. 'C'était leur famille'. Dès que l'un faisait quelque chose, les autres suivaient sans réfléchir.
Selon elle, l'agression barbare de Saint-Jean n'a pas été préméditée. Contrairement à ce qu'avance l'accusation, les rôles n'ont pas été répartis à l'avance, et les 'armes', soit la batte et un casque de moto, n'ont pas été distribuées entre les membres de la bande avant l'attaque des deux malheureux.
Guillaume de Candolle, l'avocat de l'autre prévenu, a affirmé, de son côté, que son client n'avait frappé que la victime qui avait tenté de s'enfuir. Il lui a donné des coups de pied, mais pas au visage, comme le relève le Ministère public. L'avocat a aussi rappelé que les jeunes avaient passé la soirée à boire de l'alcool.
M. de Candolle a insisté sur le rôle secondaire que son client jouait au sein de la bande, étant le dernier arrivé. Il a aussi rappelé l'importance du 'petit' dans le groupe. Celui qui provoquait les bagarres et qui est aujourd'hui accusé d'avoir poignardé à mort une personne alors qu'il était en liberté provisoire.
Des jeunes plus matures
La défense a souligné que les prévenus avaient changé. Leur passage en prison leur a été en quelque sorte bénéfique. Ils sont devenus matures, responsables et ne sont plus des adolescents en manque de repères. L'un aimerait terminer son CFC et l'autre a été engagé dans une entreprise de déménagement.
'Je veux m'excuser auprès des victimes et de leur famille, je me sens monstrueux d'avoir fait ça et j'ai honte', a déclaré le prévenu qui était considéré par les autres membres de la bande comme leur mentor. L'autre accusé a aussi présenté ses excuses. 'Si je pouvais revenir en arrière, je le ferais'.
Le Tribunal criminel de Genève rendra son jugement mercredi prochain, à 16h00.
/ATS