Le conseiller d'Etat zurichois Mario Fehr a annoncé vendredi qu'il quitte le PS avec effet immédiat. Il justifie cette décision par les tensions toujours plus grandes entre lui et la direction du parti. Celle-ci ne souhaitait pas qu'il se représente en 2023.
Après dix années au gouvernement zurichois, Mario Fehr rompt avec son parti, car la poursuite d'une collaboration avec le PS ne lui semble plus possible. 'La direction du parti est plutôt une entrave à mon travail', a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse vendredi à Zurich.
Cette démission n'est pas une véritable surprise. Les relations entre le conseiller d'Etat et son parti se sont continuellement dégradées au cours des dernières années. Mario Fehr avait déjà suspendu son appartenance au PS en 2015 à la suite d'une plainte pénale déposée contre lui par les Jeunes socialistes zurichois (Juso).
Dérive vers la gauche
En tant que conseiller d'Etat, on dépend du soutien de ses partenaires, a indiqué vendredi le ministre de la sécurité. Le PS est devenu de plus en plus idéologique et a clairement dérivé vers la gauche, notamment en matière de sécurité et d'asile, estime Mario Fehr. La coopération avec le parti est devenue 'de plus en plus difficile pour moi, voire impossible', a-t-il ajouté
De son côté, le PS zurichois a indiqué vendredi qu'il ne souhaitait pas que Mario Fehr se représente aux élections cantonales de 2023. Sa démission n'est donc pas une surprise pour le parti. Le PS souhaitait informer de cette décision à la fin des vacances d'été, mais Mario Fehr 'a décidé de le faire plus tôt', constate le PS.
Insultes, plaintes et poursuites pénales
Mario Fehr déplore l'intolérance croissante à l'égard des opinions dissidentes au sein du PS. Cette intolérance s'est manifestée sous la forme de critiques, d'insultes, de plaintes et de poursuites pénales, a-t-il affirmé. Selon le conseiller d'Etat, il n'y a probablement aucun autre parti qui critique un de ses ministres de cette manière pendant des années.
La Jeunesse socialiste a déposé plainte contre Mario Fehr en juillet 2015, suite à l'achat d'un programme informatique de surveillance destiné à la police cantonale pour lutter contre le gros trafic de drogue et le blanchiment d'argent. Les jeunes socialistes l'accusaient d'abus de pouvoir et d'acquisition illégale de données.
Le Ministère public n'a pas donné suite à la plainte, estimant qu'il n'y a pas eu d'abus et de récoltes illégales de données. Se basant sur les conclusions du Ministère public, le bureau du parlement cantonal a refusé en novembre de la même année de lever l'immunité du conseiller d'Etat.
Appartenance au PS suspendue en 2015
Le conseiller d'Etat avait suspendu son appartenance au parti à la suite de la plainte. Le PS avait désapprouvé la démarche des Jeunes socialistes, espérant ainsi que ses relations avec Mario Fehr puissent se normaliser.
'Une démission fait toujours mal, même si elle est le résultat de différences inconciliables', écrit le PS, qui remercie au passage le conseiller d'Etat 'pour ses nombreuses années d'engagement'. 'On sait que la coopération entre Mario Fehr et le parti n'a pas toujours été facile, notamment dans le domaine de l'asile 'où il existe de grandes divergences de vues', souligne le PS.
Mario Fehr a dit vendredi qu'il veut préserver sa capacité à gouverner et sa crédibilité. Quitter le parti après 39 ans n'a pas été une décision facile. C'est le résultat 'd'un processus long et douloureux, mais inévitable'. Il n'a pas l'intention de rejoindre un autre parti politique. Il décidera dans un an au plus tôt s'il brigue un nouveau mandat lors des élections cantonales de 2023, a-t-il précisé.
Sécurité et asile
Mario Fehr est critiqué depuis des années par l'aile gauche du PS et la Jeunesse socialiste en raison de sa fermeté en matière de sécurité et de ses positions dans le domaine de l'asile. Ses adversaires l'accusent de ne pas représenter adéquatement les valeurs du PS et de la gauche avec des positions jugées trop bourgeoises.
Mario Fehr est'devenu de plus en plus inhumain et a dérivé vers la droite', ont tweeté vendredi les Jeunes socialistes. Et d'ajouter: 'Il était temps' qu'il démissionne, car 'il n'était plus digne d'un parti social comme le PS'.
'Une erreur'
La démission de Mario Fehr est 'incompréhensible et une erreur', a déclaré le conseiller aux Etats Daniel Jositsch (PS/ZH) dans une interview accordée au Tages-Anzeiger. Il y a de la place au Parti socialiste pour des opinions dissidentes, selon l'élu qui appartient à l'aile modérée du PS.
Lors des élections cantonales de 2019, la candidature de Mario Fehr pour un nouveau mandat au gouvernement a été acceptée à une faible majorité au sein du PS. Les Verts et la Liste alternative (AL) ne l'ont pas soutenu durant la campagne. Il a tout de même été réélu à l'exécutif avec le meilleur résultat.
Mario Fehr est entré au gouvernement zurichois en 2011. Il est chef du département de la sécurité. Il a siégé au Conseil national de 1999 à 2011.
/ATS