La Suisse va durcir le ton contre le terrorisme. Le Conseil fédéral a mis en consultation jusqu'au 13 octobre une série de mesures pénales. Deux autres paquets suivront cette année.
Lorsqu'on voit les images des attentats, on pense que cela pourrait aussi nous arriver, à soi, à sa famille ou à ses proches. Il faut donc pouvoir intervenir avant que l'acte soit commis, a fait valoir Simonetta Sommaruga jeudi devant la presse.
La Suisse ne cédera pas pour autant sur ses valeurs et l'état de droit, a-t-elle souligné. Les garanties de procédure et les libertés de réunion, d'expression et religieuse restent préservées.
Djihadistes
Le premier paquet de mesures permettra à la Suisse de ratifier la Convention du Conseil de l'Europe pour la prévention du terrorisme et son protocole additionnel. Le code pénal sera complété par une interdiction de recrutement, d'entraînement et de voyage en vue d'un acte terroriste.
Cette disposition s'appliquera tant aux groupes qu'aux individus isolés. Elle permettra à tout un chacun de comprendre quels sont les actes interdits et quelle est la peine encourue (privation de liberté jusqu'à cinq ans). Les appels au crime et l'apologie du terrorisme seront quant à eux poursuivis en vertu des dispositions pénales sur l'incitation à la violence ou sur l'instigation.
Peine maximale plus lourde
La loi interdisant Al-Qaïda, Daesh et les organisations apparentées en vigueur jusqu'à fin 2018 devrait devenir caduque. La loi sur le renseignement permettra en effet au Conseil fédéral d'interdire des organisations et de punir quiconque y participe ou les soutient.
Il faudra toutefois recourir pendant une période transitoire à la prolongation du premier texte, afin de pouvoir adapter le second après son entrée en vigueur.
Concrètement, le Conseil fédéral propose de compléter la loi sur le renseignement sur deux points: la peine maximale encourue doit être fixée à cinq ans de privation de liberté et non trois, et les autorités fédérales de poursuite pénale devraient recevoir compétence pour agir dans ce domaine.
Le gouvernement propose par ailleurs d'actualiser la norme pénale contre les organisations criminelles, qui inclura les organisations terroristes. Il souhaite en outre faire passer la peine maximale encourue en cas de soutien ou de participation à une organisation terroriste de cinq à dix ans et celle qui vise les membres dirigeants à 20 ans de peine privative de liberté.
Meilleure entraide
La collaboration avec l'étranger doit en outre être améliorée. La Suisse doit aujourd'hui attendre la clôture formelle d'une procédure d'entraide judiciaire avant de fournir à d'autres pays des informations précieuses pour leurs enquêtes. A l'avenir, il sera possible, sous certaines conditions, de transmettre de façon anticipée certaines informations et moyens de preuve.
Cela devra concerner un danger grave et imminent (prise d'otages, attaque d'une gare ou d'un aéroport). Des garanties seront demandées (utilisation des informations que pour l'enquête, possibilité d'informer la personne concernée, retrait des données si l'entraide est refusée).
Des équipes communes d'enquête pourront par ailleurs être formées. La loi sur le blanchiment d'argent nécessite aussi d'être renforcée. La Suisse ne peut à l'heure actuelle intervenir qu'une fois qu'elle est en possession d'une communication de soupçons de blanchiment d'argent provenant d'un intermédiaire helvétique.
Résultat: deux tiers des 4100 demandes étrangères n'ont pas pu être traitées l'an dernier. Il devrait donc être possible d'agir en présence d'informations de partenaires étrangers.
Autres projets
Ces tours de vis ne sont pas les derniers. Le Conseil fédéral avait déjà laissé entendre qu'il voulait prendre d'autres mesures. Il s'agirait notamment de pouvoir obliger les personnes à risque de se présenter à la police, de leur interdire de quitter le territoire ou de leur retirer leur passeport.
Un projet sera mis en consultation d'ici la fin de l'année. Le Conseil fédéral veut encore analyser le bien-fondé de chaque mesure à l'étude et tenir compte de l'expérience faite dans d'autres pays.
La répression ne suffit pas. Elle peut même pousser à la radicalisation, a souligné Mme Sommaruga. Le gouvernement veut donc aussi agir du côté de la prévention et de la réintégration, un secteur qui relève avant tout des cantons et des communes.
Un plan d'action contre la radicalisation et l'extrémisme violent sera élaboré encore en 2017. Il contiendra des mesures et recommandations pratiques dans tous les domaines de la société en vue d'assurer la détection précoce.
/ATS