Les milieux de la santé veulent interdire toute forme de publicité pour le tabac ciblant les enfants et les jeunes. Une initiative populaire a été lancée mardi. Elle répond au refus du Parlement de légiférer et va plus loin que le projet du Conseil fédéral.
La loi actuelle comporte des 'lacunes inacceptables', a déclaré devant les médias à Berne le conseiller aux Etats Hans Stöckli (PS/BE), à l'origine du texte. Il veut mettre fin à une contradiction: 'la vente de produits du tabac est interdite aux mineurs, mais plus de la moitié des fumeurs ont commencé à fumer avant 18 ans'.
La publicité pour les produits du tabac cible particulièrement les jeunes, qui représentent la future clientèle de cette industrie. Une catégorie d'âge spécialement vulnérable et influençable: attrait de la découverte, pression du cercle social, exemples familiaux ou effets de mode sont des facteurs qui poussent les adolescents à essayer la cigarette.
Le Dr Marcel Mesnil, secrétaire général de la Société suisse des pharmaciens, condamne les affirmations mensongères de l'industrie du tabac pour séduire les jeunes. 'Il faut cesser de propager des images positives du tabac, c'est une intoxication chronique, rien d'autre'.
Dès leur plus jeune âge, les enfants sont capables d'associer un logo avec le nom d'une marque, à l'image du chameau sur les paquets de cigarettes Old Joe the Camel, souligne le Dr Heidi Zinggeler Fuhrer, représentante de la société suisse de pédiatrie.
'Les politiques continuent de minimiser les risques du tabac', a abondé Gilbert Zulian, médecin et président de la Ligue suisse contre le cancer. Chaque année, plus de 9000 personnes meurent des effets du tabac, soit 25 par jour. Le tabagisme entraîne des coûts de 8 milliards de francs par an, à la charge de la collectivité. Il est le premier facteur de décès évitable.
Seul moyen efficace
Seul moyen efficace aux yeux des acteurs concernés: l'interdiction de la publicité, y compris le sponsoring et la promotion. L'initiative 'Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac' demande que la Confédération interdise toute forme de publicité pour les produits du tabac qui atteint les enfants et les jeunes. Une telle mesure permettrait d'économiser un milliard de francs par an.
D'autre part, les autorités fédérales et cantonales devraient s'engager à promouvoir la santé des enfants et des jeunes, en plus de la responsabilité individuelle.
En matière de publicité pour le tabac, la Suisse fait figure de mouton noir en Europe, a rappelé le Dr Zulian. Les cigarettes pour enfants, sous forme de chewing-gum ou en chocolat, sont aussi dans le viseur des milieux de la santé. De nombreux pays les ont interdites, comme la Finlande et l'Irlande, mais pas la Suisse.
'Il en va de l'avenir de nos enfants', a conclu Philippe Luchsinger, président de Médecins de famille et de l'enfance Suisse. L'initiative est soutenue par toutes les organisations de la santé et de la jeunesse. Elle peut être signée en ligne, dans les cabinets de pédiatres, de médecins de famille, les pharmacies et drogueries.
Projet moins radical
En 2016, le Parlement a renvoyé au Conseil fédéral son projet de loi sur les produits du tabac. La majorité n'a notamment pas voulu des propositions concernant les interdictions de publicité.
La nouvelle mouture du gouvernement ne prévoit pas d'interdiction de publicité dans les cinémas, par voie d'affichage et dans la presse payante. Déjà en vigueur dans une majorité de cantons, l'interdiction de la vente de produits du tabac aux mineurs devrait être étendue partout en Suisse.
La publicité pour les produits du tabac ne serait plus permise sur Internet ni dans les journaux gratuits. Une interdiction est également prévue dans les lieux de vente à certains endroits stratégiques, par exemple dans les kiosques à proximité des bonbons.
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/ATS