La place financière genevoise est préoccupée après les six premiers mois de l'année 'difficiles'. Bénéfices, actifs et emploi s'affichent en retrait, dans un contexte d'incertitudes sur les conditions-cadres.
'La compétitivité de la place financière ne se décrète pas', a affirmé devant la presse le président de la Fondation Genève Place Financière (FGPF) Yves Mirabaud. Selon plusieurs indices récents, 'Genève perd de son influence face à d'autres centres'. L'Asie est attirée, l'Europe et l'Amérique latine moins.
A l'occasion de l'enquête conjoncturelle annuelle publiée mardi, M. Mirabaud a ciblé trois incertitudes à lever sur la libre circulation, l'accès aux marchés étrangers et la fiscalité des entreprises. Un échec de RIE III 'aurait un effet dévastateur sur l'emploi', affirme-t-il, persuadé que de nombreuses entreprises se déplaceraient dans le canton de Vaud qui a adopté sa réforme.
Ces préoccupations sont relayées par l'enquête conjoncturelle. Les apports viennent quasiment exclusivement de clients à l'étranger.
Sans accès au marché européen, le 'risque de délocalisation' est clair, a relevé le directeur de la Fondation Edouard Cuendet. Plus de 80% des grandes banques et 53% des gestionnaires indépendants affirment que de telles restrictions changeraient de manière 'significative' leur modèle d'affaires.
Pas d'effet du Brexit prévu
Les petites banques sont toutefois plus de 70% à prétendre le contraire et les banques moyennes plus de 53%. Autre élément significatif, les établissements choisiraient massivement Luxembourg s'ils devaient transférer des activités. Alors qu'en 2015, Singapour était plébiscitée.
Et M. Mirabaud de ne pas s'attendre à un effet positif du Brexit pour Genève en raison de l'incertitude. Outre les conditions-cadres, il faudra innover notamment dans la formation et les Fintech sur lesquelles la Suisse est passée à l'étape supérieure, selon M. Cuendet.
Parmi les indicateurs de l'enquête conjoncturelle, la situation est globalement moins bonne. 'C'est surtout vrai pour les grands établissements', selon M. Mirabaud. Ils font souvent office de précurseurs pour les autres.
Les charges salariales sont stables, voire en légère augmentation pour les petites banques. Le bénéfice net d'un tiers des grandes banques a reculé de 8 à 14%. Pour les établissements moyens, plus d'un quart ont même décroché de plus de 15%.
Impact sur l'emploi attendu
La situation semble moins problématique pour les petites banques. Mais plus de la moitié d'entre elles figurent tout de même dans la fourchette entre baisse de 7% et croissance de 2%. De même que les gestionnaires de fortune indépendants.
En terme d'emploi, si le chômage pur semble stable, les alarmes sont au rouge. En raison des préavis, des plans sociaux et de la capacité d'absorption par le domaine financier extra-bancaire, cet indicateur 'est différé', précise M. Cuendet.
Mais les établissements évoquent clairement des réductions d'effectifs. Cette baisse est constatée dans le contexte de coupures de milliers de postes dans le secteur en Suisse.
Côté actifs sous gestion, les banques poursuivent globalement leur recul. Les différences entre apports et retraits et la situation des marchés l'expliquent. La gestion de fortune et les sociétés de négoce restent toutefois des domaines où Genève figure parmi les meilleurs.
Grandes banques plus alarmistes
Pour l'ensemble de 2016, la 'prudence' va perdurer, selon M. Cuendet. Les grandes banques s'attendent à un recul similaire du bénéfice net à celui des six premiers mois. La situation devrait légèrement s'améliorer pour les banques moyennes et petites mais un peu se détériorer pour les gestionnaires indépendants.
Sur l'emploi, grandes banques et gestionnaires indépendants prévoient un recul des effectifs. Plus de 53% des banques moyennes devraient en revanche augmenter leur dispositif. La situation devrait être stable chez les petites banques. Ces catégories sont encore dans l'adaptation aux nouveaux règlements, estime M. Cuendet.
Pour 2017, le pessimisme est plus important chez les grandes banques. Pour les autres établissements, la situation devrait être stable. Au total, la place financière emploie 37'000 collaborateurs, dont 18'000 pour les banques. Elle contribue à 15% du PIB genevois, une part en recul.
/ATS