Le franc suisse a atteint vendredi son plus bas niveau face à l'euro depuis l'abandon du cours plancher liant les deux devises le 15 janvier dernier par la Banque nationale suisse (BNS). La monnaie unique a dépassé 1,10 franc vers 11h20, une première en huit mois.
Vers 13h20, l'euro se maintenait toujours au-dessus de 1,10 franc, notant alors à 1,1011 franc, après un plus haut 1,1030 franc vers 12h40. La devise helvétique perdait aussi un peu de terrain par rapport au dollar, le billet vert se négociant dans le même temps à 0,9790 franc.
Interrogé par l'ats, Alexis Körber, économiste de l'institut de recherches économiques bâlois BAKBASEL attribue l'affaiblissement du franc aux premiers effets de l'introduction de taux d'intérêts négatifs par la BNS. Les coûts des dépôts en francs sont devenus trop élevés pour de nombreuses sociétés, comme les caisses de pensions, lesquelles recherchent des rendements plus élevés.
Le phénomène peut aussi s'expliquer par des réactions techniques liées au 'carry trade', indique M. Körber. Ces opérations, qui jouent sur les écarts de rendement, consistent à emprunter dans des pays disposant de taux bas pour investir dans des pays où les taux sont élevés.
Cours acceptable
Depuis la mi-juillet, moment auquel un euro valait 1,0397 franc, la monnaie unique s'est appréciée, avec des pics à 1,0915 franc le 11 août dernier, puis 1,0968 franc le 8 septembre dernier. Le franc a par ailleurs affiché une relative stabilité face aux récentes turbulences parties de Chine et qui ont pesé sur l'ensemble des places boursières.
Un maintien durable du cours de l'euro au-dessus de 1,10 franc, un niveau généralement considéré comme acceptable, est évidemment favorable à l'ensemble des exportateurs helvétiques, poursuit M. Körber. A l'inverse, l'appréciation du franc à la parité avec la monnaie unique est dangereuse pour l'économie suisse, avec pour conséquence un ralentissement des investissements et des transferts de production.
BAKBASEL, qui a révisé vendredi ses prévisions conjoncturelles pour la Suisse pour cette année et la suivante, estime que le franc devrait continuer de s'affaiblir ces prochains mois, pour afficher vers la fin 2016 un cours de 1,15 franc pour un euro. Toutefois, l'hypothèse repose sur une stabilisation de la situation en Grèce et un atterrissage en douceur de l'économie chinoise.
Evolution positive dans la zone euro
Une embellie conjoncturelle dans les pays industrialisés se traduit de manière globale par une aversion moindre au risque et, par conséquent, une diminution de la pression pesant sur le franc, explique M. Körber. Après le creux conjoncturel de cette année, la croissance devrait légèrement s'accélérer l'an prochain, avant d'afficher une véritable reprise en 2017.
Ces derniers jours, la monnaie unique s'est aussi appréciée, celle-ci continuant d'être considérée par les investisseurs comme un refuge alors que les inquiétudes sur l'état de l'économie chinoise perdurent, ont relevé les cambistes. D'autre part, la devise européenne a reçu le soutien de données conjoncturelles encourageantes dans les pays de la zone euro.
L'euro bénéficie aussi des interrogations sur le calendrier d'un éventuel relèvement des taux d'intérêt américains par la Réserve fédérale américaine (Fed). Alors que l'évolution de la conjoncture semble actuellement plus facile à cerner, le franc perd quelque peu de son attrait en tant que valeur refuge.
/ATS