La croissance des salaires dans le monde n'a atteint que 1,7% en 2015, son plus bas niveau en quatre ans. Les inégalités s'aggravent au sein des pays, a dit jeudi à Genève l'OIT.
En dehors de la Chine où elle est rapide, la croissance mondiale est passée de 1,6% en 2012 à 0,9% en 2015, souligne le rapport des salaires 2016/2017 de l'organisation. En prenant en compte l'empire du Milieu, elle atteignait encore 2,5% en 2012 contre 1,7% en 2015.
L'augmentation plutôt forte constatée il y a quelques années dans les pays en développement 's'est ralentie' voire retournée, dit l'Organisation internationale du travail (OIT). Au sein du G20, la croissance des salaires réels a diminué de plus de 6% à 2,5%. En revanche, les pays développés de ce groupe ont avancé de 0,2% en 2010 à 1,7% en 2015, au plus haut depuis dix ans.
La croissance des salaires a notamment atteint 2,8% en Allemagne, 2,2% aux Etats-Unis, 1,9% dans les pays de l'UE et 1,5% dans le nord, le sud et l'ouest de l'Europe, dont en Suisse. Mais les pays développés sont confrontés à des incertitudes 'grandissantes', a relevé la directrice générale adjointe de l'OIT Deborah Greenfield.
Il est difficile de savoir si cette hausse va continuer, a-t-elle affirmé devant la presse. Globalement, à moyen terme, 'nous ne voyons pas les salaires augmenter en particulier en lien avec la productivité'. L'argent est davantage investi dans des secteurs qui ne la renforcent pas.
Trop d'inégalités
Une baisse des salaires pourrait augmenter le contexte déflationniste. Elle impacterait la consommation des ménages, la demande et la croissance économique. Aux Etats-Unis, il faudra aussi attendre l'arrivée de Donald Trump à la présidence. 'Il y a une préoccupation croissante' sur les conséquences qu'un changement de politique pourrait avoir sur ces questions.
Parmi les autres régions, la croissance reste solide en Asie/Pacifique à 4%, elle diminue à 3,4% en Asie centrale et de l'Ouest. Elle est estimée à 2,1% dans les Etats arabes, 2% en Afrique et se réduit de 1,3% en Amérique latine et de plus de 5% dans l'Est de l'Europe.
Selon l'OIT, les inégalités s'aggravent. Dans la plupart des pays, le 1% le mieux rémunéré progresse davantage que les 10% les plus riches qui avancent eux-mêmes largement par rapport aux autres employés.
En Europe, les 10% les mieux dotés obtiennent un quart de la totalité des salaires. Soit presque autant que les 50% les moins bien payés. La part des mieux rémunérés est encore plus importante dans les pays émergents.
Les écarts entre les hommes et les femmes sont d'environ 20% en Europe. Mais ce décalage augmente à environ 45% parmi le 1% le mieux payé. Pour les patrons, il dépasse même 50%.
Inégalité dans les entreprises
Pour la première fois, le rapport évalue les écarts au sein des entreprises. Les inégalités entre les 10% des sociétés les mieux dotées par rapport aux 10% les plus basses sont plus fortes dans les les pays en développement.
En Europe, environ 80% des employés sont moins bien payés que la moyenne de leur entreprise. Parmi le 1% des entreprises qui attribuent les plus hauts salaires moyens, le 1% le mieux rémunéré se voit attribuer 120 fois plus que celui le moins bien doté.
La contribution des inégalités au sein des entreprises au décalage salarial total atteint environ 50%, explique Mme Greenfield. Le rapport ne donne pas de recommandation sur un écart. Mais la directrice générale adjointe affirme que les différentes initiatives soumises au vote en Suisse constituent 'le type de cadre réglementaire' pour une distribution 'plus abordable'.
'Il faut un mélange de politiques', ajoute-t-elle toutefois. Outre la régulation ou l'autorégulation des rémunérations excessives, l'OIT considère que les salaires minimaux, adoptés ou étendus par de nombreux pays récemment, et la négociation collective constituent des moyens décisifs pour réduire les inégalités. Elle recommande encore une meilleure productivité au sein d'entreprises durables.
/ATS