Si une moitié de la pollinisation des cultures est assurée par l'abeille domestique, l'autre moitié est le fait de 125 espèces d'abeilles sauvages et de bourdons. C'est le constat d'une étude internationale avec participation suisse publiée mardi.
Il y a en Europe centrale environ 750 espèces d'abeilles sauvages, en Suisse 600. Mais au niveau mondial, seuls 2% des espèces sont responsables des 80% de la pollinisation imputée à l'ensemble des abeilles sauvages, écrivent les scientifiques dans la revue 'Nature Communications'.
Selon ces travaux, auxquels ont participé des chercheurs d'Agroscope et de l'Université de Berne, la valeur ajoutée apportée par les abeilles sauvages par hectare de culture est en moyenne de 3000 dollars. L'abeille domestique apporte une contribution identique.
Pour parvenir à ces résultats, cette analyse a pris en compte les données de 90 études portant sur 1394 sites sur les cinq continents et vingt espèces de plantes cultivées comme le colza, les légumes et les fruits. Les visites de fleurs de 73'649 abeilles sauvages appartenant à un total de 785 espèces ont été relevées.
Rendement potentiel
Les spécialistes ont estimé la contribution de chaque espèce à la valeur ajoutée à partir de statistiques de prix et de rendements, qui ont été multipliées par la réduction du rendement potentiel sans pollinisation et par le nombre de visites de fleurs observées. L’efficacité de certaines mesures d’encouragement a été évaluée à partir de relevés supplémentaires dans des essais où l'on a comparé la présence d’abeilles sauvages dans des surfaces avec et sans mesures écosystémiques.
Ces espèces peuvent en effet être favorisées par des mesures éprouvées comme l’agriculture biologique, les bandes fleuries et les ourlets herbacés. De telles prestations sont déjà subventionnées aujourd’hui par des paiements directs, note Felix Herzog, d'Agroscope, co-auteur de ces travaux, cité dans un communiqué de la station fédérale de recherche.
Pour la Suisse, des données provenant de l’Entlebuch (LU/BE) ont été intégrées à l’étude. 'Des recherches ciblées sont nécessaires pour dire lesquelles des 41 espèces européennes de pollinisateurs identifiées par l’étude comme agronomiquement importantes sont également importantes pour la Suisse, poursuit Felix Herzog.
Redondance fonctionnelle
Les auteurs insistent également sur le fait qu’il existe plusieurs bonnes raisons de promouvoir les espèces rares, même si elles contribuent peu à la pollinisation. Il est par exemple difficile de dire aujourd’hui quelles seront les espèces importantes demain pour la pollinisation, dans des conditions climatiques qui auront peut-être changé.
Il est important que plusieurs espèces soient disponibles pour une même fonction. Cette redondance fonctionnelle augmente la probabilité qu’au moins une espèce continue à fournir la prestation écosystémique en cas de modification des conditions.
En outre, les espèces rares de pollinisateurs sont essentielles à la survie de nombreuses plantes sauvages qui ne sont pas pollinisées par les abeilles généralistes', souligne encore Eva Knop, de l’Université de Berne, qui co-signe ces recherches.
/ATS