La Suisse active la clause de sauvegarde pour tous les pays de l'UE
Dès mai, les travailleurs européens qui veulent s'installer en Suisse seront à nouveau soumis à des contingents. Envers et contre les critiques de Bruxelles, de l'économie et de la gauche, le Conseil fédéral a étendu mercredi la clause de sauvegarde pour limiter l'immigration liée à la libre circulation.La mesure s'applique pour une année. Elle frappe tous les ressortissants de l'Union européenne (UE) souhaitant s'établir durablement en Suisse, avec un permis B (cinq ans). Depuis un an, elle concerne déjà les personnes venant d'Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Slovaquie, Slovénie et République tchèque.Les intéressés se sont rabattus sur les permis L autorisant un séjour d'un an au plus. Pourtant, le gouvernement a renoncé à limiter ces permis, même si les voyants sont au rouge pour les Européens de l'Est.Amis avec BruxellesLe Conseil fédéral a choisi cette option parmi huit variantes. Il a effectué une pesée des intérêts entre la politique intérieure et internationale, a affirmé Simonetta Sommaruga devant la presse.La décision ne constitue pas un "acte inamical" envers l'UE, selon la ministre de la justice. La "question de savoir si cette mesure plait ou non à l'UE ne se pose pas"; intégré dans un accord bilatéral entériné par Bruxelles, elle peut s'appliquer si les critères sont remplis. Pour le moins, on ne pourra pas crier à la discrimination cette fois puisque tous les Etats sont touchés.Votations en vueAlors que les écarts économiques se creusent dans les pays voisins, la Suisse exerce un grand attrait, avec son taux de chômage bas, a déclaré la socialiste. "L'immigration est essentielle pour notre pays et son économie", mais il faut aussi prendre en compte les effets négatifs sur les salaires ou les logements, ainsi que l'inquiétude de la population.Le corps électoral devra se prononcer prochainement sur deux initiatives populaires visant à limiter fortement l'immigration, ainsi que sur l'élargissement de la libre circulation des personnes à la Croatie. Même si elle s'est gardée de s'étendre par trop sur ces scrutins, Mme Sommaruga a reconnu qu'ils ont pesé dans la balance.Effet limitéLa Suisse demeure convaincue de l'importance de la libre circulation. Même sans cet accord, les personnes à la recherche d'un avenir meilleur continueraient d'affluer vers la Suisse.A elle seule, la clause de sauvegarde n'a qu'un effet limité sur l'afflux de migrants, a admis la conseillère fédérale. Il faut la voir comme un instrument parmi d'autres pour piloter l'immigration, seule la somme des mesures permettant de régler les problèmes, a-t-elle estimé.Les mesures d'accompagnement restent plus importantes que jamais. Il est essentiel que les Suisses puissent bénéficier de logements bon marché, que la protection du paysage soit garantie et que le développement des infrastructures puisse se poursuivre.La vis sera serrée pour les Européens en recherche d'emploi, qui devront s'annoncer auprès de la police des étrangers et ne pourront pas toucher de prestations sociales. La traque aux abus sur le marché du travail devra être renforcée.Employeurs, syndicats, cantons et communes devront mettre la main à la pâte, a exigé la Bernoise. L'économie en particulier doit assumer ses responsabilités; l'immigration ne peut pas être laissée uniquement à son appréciation.Jusqu'en 2014La clause de sauvegarde permet à la Suisse de réintroduire unilatéralement des contingents pour une durée limitée jusqu'au 31 mai 2014. Condition: le nombre d'autorisations de séjour délivrées à des travailleurs provenant de l'UE doit dépasser d'au moins 10% la moyenne annuelle des permis émis au cours des trois années précédentes.Dès le 1er mai, environ 2180 autorisations seront accordées aux citoyens des huit Etats de l'Est et 53'700 à ceux venant des 17 autres pays.Plus de 1,2 million d'Européens vivent actuellement en Suisse. Avec les frontaliers - qui ne sont pas concernés par la clause - "ils contribuent largement à la prospérité de notre pays et à la création d'emplois", selon le Conseil fédéral. /SERVICE