Le chemin pour Berne passe parfois par Morépont, mais pas toujours. Les ministres Nathalie Barthoulot et Jacques Gerber en ont fait l’expérience dimanche lors des élections fédérales. La socialiste et le libéral-radical n’ont pas réussi à se faire élire au Conseil des Etats. La première a été battue par sa colistière, la sortante Mathilde Crevoisier Crelier. Quant au second, il n’a pas pu profiter suffisamment de la liste commune mise en place par son parti, le PLR, avec l’UDC. Pour Line Rennwald, politologue d’origine jurassienne au FORS, le Centre de compétences suisses en sciences sociales, l’échec des ministres en place comporte plusieurs explications. Elle souligne que la population n’a pas goûté que des ministres désirent quitter le Gouvernement en cours de route. Line Rennwald indique qu’il peut s’agir, à la fois, « d’un vote de soutien à l’action gouvernementale » ainsi que d’une forme de « ressenti envers la classe politique ». La candidature des ministres a pu donner l’impression que ces derniers cherchaient « à anticiper leur futur professionnel » et « à planifier leur carrière » dans « un contexte de ressentiment envers la classe politique », selon la politologue.
Line Rennwald estime également que les non-élections de Nathalie Barthoulot et de Jacques Gerber peuvent aussi s’interpréter comme une sanction en lien avec certains dossiers comme celui de la géothermie profonde. Selon elle, la candidature simultanée de deux ministres a, par ailleurs, renforcé l’impression que les dossiers importants ne seraient plus suffisamment suivis.
Line Rennwald : « On a l’impression que ça été peu apprécié par la population que des ministres, en cours de mandat et avec des dossiers importants, quittent le Gouvernement »
Aucun ministre-candidat PLR et PS n’a donc été élu au Conseil des Etats. Conséquence : il n’y aura pas d’élection partielle au Gouvernement jurassien. Les prochaines Cantonales auront ainsi lieu en 2025. L’analyse de Raphaël Chalverat :
Au Parti socialiste, le fait de ne pas devoir repartir immédiatement au combat est qualifié de « situation confortable ». Le PSJ affirme qu’il aurait été prêt. Mais on imagine aisément que le temps à disposition avant 2025 est le bienvenu pour soigner quelques bobos provoqués par les tensions internes nées lors de l’élaboration de la stratégie et des listes pour les élections fédérales de dimanche dernier.
Au PLR, la donne ne change pas vraiment les choses. Que ce soit ces prochains mois ou dans deux ans, conserver un siège au Gouvernement sera très difficile.
Absent des Fédérales, le PCSI nous avait confié vouloir se concentrer sur la politique cantonale. Le parti est peut-être le premier déçu de l’absence d’une partielle à l’exécutif, lui qui envisageait de s’engouffrer dans la brèche. L’occasion aurait été bonne pour lui de se profiler et de trouver des alliances peut-être plus facilement. Dans la lutte générale de 2025 – où toutes les formations voudront être de la partie – ça sera un peu plus ardu.
Enfin, et c’est un élément essentiel, les prochaines élections cantonales seront inédites : les Prévôtois pourront voter avant l’entrée de Moutier dans le Jura le 1er janvier 2026. Les cartes seront donc rebattues. C’est toute la stratégie qui sera à revoir, pour tout le monde, à droite, au centre et à gauche. Ce coup de fouet ouvrira un nouveau chapitre de l’histoire politique jurassienne.