« Je ressens un grand coup au cœur de voir notre boucherie perdurer ». Une semaine après la fête du jubilé de la boucherie Nyffeler de Moutier, le patron partage son émotion. 75 ans que le commerce tourne. Bientôt, une troisième génération reprendra la main. Depuis 1950, la gestion a bien changé, raconte André Nyffeler. Dans le temps, les recettes étaient tenues secrètes. « Elles étaient dans la tête de mon papa », se souvient le directeur de la boucherie prévôtoise. Désormais, tout est manuscrit, ce qui permet de garder une traçabilité de chaque produit et de savoir ce qu’il contient.
Son fils Bastian Nyffeler reprendra la direction de l’entreprise familiale dans un avenir proche. Il observe une perte d’attractivité du métier. « La main d’œuvre qualifiée se trouve de plus en plus difficilement », regrette-t-il. Pour l’instant, la boucherie compte quatorze employés et apprentis, tous originaires de la région. L’ancien informaticien s’attend toutefois à ce que le recrutement devienne de plus en plus difficile: « Pour l’instant nous y arrivons, mais dans 20 ans, avec le peu de personnes formées aujourd’hui, est-ce que l’on y arrivera encore ? »
Bastian Nyffeler : « Ce qui m’inquiète, c’est le manque de main d’œuvre qualifiée. »
Les boucheries n’ont plus la cote
Une crainte qui fait écho à la situation régionale. À l’heure où la boucherie prévôtoise souffle ses 75 bougies, ce type de commerces se fait de plus en plus rare dans la région, et le secteur fait face à un essouflement général. Dans les années 50, une douzaine de boucheries se trouvaient à Moutier. Depuis, il n’en reste qu’une, celle de la famille Nyffeler. Le père n’est pas surpris par cette tendance. « À mon époque, nous étions trente apprentis par année dans le Jura bernois, aujourd’hui ils ne sont que six entre les cantons de Berne, du Jura et de Neuchâtel. »
André Nyffeler : « Les écoles insufflent les études et pas les métiers artisanaux. »
Pour André Nyffeler, les études sont bien plus mises en avant que les professions dans l’artisanal. « Rien ne donne envie de se lancer dans un métier comme le nôtre », ajoute-t-il. Son fils confirme, les horaires ne sont pas non plus attrayants et la charge de travail reste élevée. La consommation de la population a également nettement diminué. /ehe