Le Parlement jurassien a accepté ce mercredi en première lecture la révision totale de la Loi sur la prostitution. Parmi les changements majeurs, une clarification nette de l’interdiction aux personnes mineures de l’exercice de la prostitution et des prérogatives renforcées pour les communes.
« Il y a encore une dizaine d’années, les communes apprenaient parfois via des voisins ou habitants qu’un lieu de prostitution venait d’ouvrir sur leur territoire ». Ce souvenir du député delémontain Claude Schlüchter l’avait poussé à déposer une initiative parlementaire sur le sujet en 2016. La révision totale de la Loi sur la prostitution, adoptée ce mercredi en première lecture par le Parlement jurassien avec par 47 voix et 11 abstentions, vient selon lui « corriger le tir ». Parmi les changements majeurs, un renforcement des prérogatives des communes ou encore une clarification nette de l’interdiction aux personnes mineures de l’exercice de la prostitution et de l’accès aux salons ou agences d’escorte. Rare voix dissidente, le député Alain Schweingruber (PLR) estime que le texte charge inutilement les tâches de l’Etat : « On s’en fiche de cette loi, parce que le peuple jurassien s’en fiche ! On doit réduire les tâches de l’État, et chaque mois ici on fait le contraire. On a déjà une loi sur la prostitution, on s’occupe dans ce Parlement. On augmente les tâches de l’Etat au lieu de les réduire », a-t-il lancé à la tribune.
Alain Schweingruber : « C’est vraiment se moquer du monde ! »
Compétentes pour les changements d’affectation et préavisé les autorisations
La « LProst » répond notamment à un postulat déposé par Paul Froidevaux en 2013, en se soumettant aux règles cantonales en matière de construction et d’aménagement du territoire (art.3). Traduction : un changement d’affectation nécessite l’obtention d’un permis, ce qui fait partie des compétences communales. « Les communes ont désormais droit au chapitre et en matière d’aménagement du territoire, elles ont des compétences larges », salue le député et président de l’Association jurassienne des communes Lionel Maître. Les responsables de salon de prostitution devront aussi désormais déposer une demande d’autorisation auprès des autorités communales. Ces dernières formuleront un préavis au vu des règles en vigueur avant de transmettre le dossier au Service de l’économie et de l’emploi. Bref, un droit de regard, et même de contrôle, qui évite qu’une commune ne découvre le pot aux roses sans en avoir été avertie. « C’est déjà le cas, les communes sont déjà police des constructions ! Mais on fait croire qu’on leur donne plus de prérogatives. On travaille pour rien ! », s’est emporté devant le plénum Alain Schweingruber.
De son côté, le ministre en charge du dossier, Martial Courtet, estime que la loi revêt une utilité : « Cela valait la peine de faire ces démarches, même si je soutiens le fait de ne pas surcharger l’administration », explique-t-il.
Martial Courtet : « Nous avons vraiment entendu les communes pour aller aussi loin que possible au niveau juridique. »
Les communes pourront édicter des restrictions
Leurs compétences vont encore plus loin puisque les communes pourront désormais édicter des restrictions, ce qui était auparavant du ressort du Gouvernement. Des restrictions communales pourraient par exemple s’appliquer sur la prostitution dans des quartiers d’habitation, près des écoles, lieux de culte, ou encore aux abords d’endroits fréquentés du public. Ces évolutions ont été accueillies très favorablement par les communes : 87% d’avis favorables ont été recensés en phase de consultation selon l’exécutif. /jpi